Le Médiéviste et l’ordinateur
Le Médiéviste et l’ordinateurHistoire médiévale, informatique et nouvelles technologies
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N° 45, 2006 : Formes et couleurs dans les manuscrits, élaboration d’un outil

Avant-propos

Auteur

Anne-Marie Eddé
Institut de recherche et d’histoire des textes
http://www.irht.cnrs.fr/


Citer cet artcile

Anne-Marie Eddé, « Avant-propos », Le Médiéviste et l’ordinateur, 45, 2006 (Formes et couleurs) [En ligne] http://lemo.irht.cnrs.fr/45/avant-propos.htm

Mots clés

reconnaissance automatique de formes, nouvelles technologies de l’information et de la communication appliquées au manuscrit médiéval, reconnaissance de structure, classification automatique.

Résumé

La directrice de l’IRHT salue une collaboration exemplaire née d’un appel à projet 2003 du CNRS entre divers partenaires, chercheurs et conservateurs, publics et privés, sur une entreprise à la jointure entre sciences de l’homme et de l’informatique. À l’heure de la numérisation du patrimoine, un outil de reconnaissance des formes et des couleurs, applicable à la très riche collection de reproductions de manuscrits que l’IRHT alimente en lien étroit avec le monde des bibliothèques publiques, était souhaitable pour la recherche sur le manuscrit du Moyen Âge, sa conservation, sa diffusion et sa valorisation. Les avancées exposées dans ce numéro sont le premier pas d’un mouvement qui se poursuivra.

La table ronde qui nous réunit aujourd’hui est l’aboutissement d’un projet et d’une collaboration scientifique interdisciplinaire exemplaire entre un laboratoire de recherche en Sciences de l’Homme et de la Société du CNRS (Institut de recherche et d’histoire des textes, Paris-Orléans) et des laboratoires d’informatique (LIRIS – Institut National des Sciences Appliquées de Lyon, École Nationale Supérieure des Télécommunications de Paris, Laboratoire d’Informatique Fondamentale d’Orléans), entre le CNRS et la Médiathèque de l’agglomération troyenne, mais aussi entre la recherche publique et la recherche privée représentée ici par la société Archimed. Au-delà des participants actifs, ce projet a aussi vivement intéressé plusieurs autres partenaires, en particulier la Direction du Livre et de la Lecture (ministère de la Culture) et la Sous-Direction des Bibliothèques et de la Documentation (ministère de l’Éducation nationale, de la Recherche et de l’Enseignement supérieur), toutes deux très impliquées dans la politique de numérisation du patrimoine.

Le choix du thème sur lequel nous avons travaillé pendant dix-huit mois revient à Élisabeth Lalou, alors chargée de mission aux nouvelles technologies à l’IRHT, fortement encouragée par Jacques Dalarun, ancien directeur de notre institut. Elle nous dira elle-même, dans un instant, comment ce projet naquit d’une longue réflexion, d’un travail entamé il y a plusieurs années déjà. Mais c’est à l’occasion d’un appel à projet lancé par le CNRS au début de l’année 2003 sur le thème « Archivage et patrimoine documentaire. Apport des sciences de l’information et de la cognition » qu’il prit véritablement forme. Tous les partenaires cités plus haut ont répondu présents, et 20 000 euros ont alors été obtenus pour ce programme sur une durée de dix-huit mois.

L’objectif tel qu’il était annoncé dans le document primitif était d’élaborer un outil de reconnaissance des formes et des couleurs dans les manuscrits médiévaux et de traiter, en même temps, les archives numériques issues de la reproduction de ces manuscrits, avec les problèmes afférents : aspects techniques de prises de vues, formats de fichiers, supports et conditions de conservation des images, exploitation pour la recherche de ces images, moyens techniques de leur mise en ligne.

Nous verrons aujourd’hui si une partie au moins de ces objectifs a été atteinte, mais quoi qu’il en soit, cette table ronde ne doit pas, à mes yeux, être une conclusion mais bien au contraire le début d’un nouveau programme qui naîtra de cette expérience et qui en tirera les leçons pour aller plus loin.

La numérisation du patrimoine (écrit, oral, artistique, médiatique) est en marche. Elle présente d’immenses avantages aussi bien pour la conservation que pour la recherche, la diffusion et la valorisation. Dans le domaine du livre beaucoup d’entreprises sont en train de voir le jour. Aux États-Unis, mais aussi en Europe où l’on est très attaché à la diversité culturelle et linguistique du patrimoine. D’où la naissance de MICHAEL (inventaire multilingue du patrimoine culturel européen), élaboré en commun par la France, l’Italie et le Royaume-Uni et soutenu par la Commission européenne : un projet qui vise à proposer un portail donnant un accès simple et direct à toutes les collections et fonds numérisés des bibliothèques, musées et archives des différents pays européens. Né en 2004, lancé en France en avril 2005, ce programme est fortement encouragé par le Ministère de la Culture qui le coordonne au niveau français et y consacre un budget important (15 millions d’euros par an dont 10 millions pour l’audiovisuel) qui a permis de numériser d’ores et déjà des millions de documents.

Les manuscrits ont profité de cet intérêt pour la numérisation des documents. Notre projet n’aurait jamais pu être mené sans la contribution de nos collègues informaticiens qui ont fait l’essentiel du travail avec l’aide de leurs doctorants et post-doctorants. Mais il n’aurait pas pu exister non plus sans l’abondante et excellente documentation photographique réalisée par l’IRHT selon des critères scientifiques et techniques extrêmement précis et élaborés. Je tiens à rendre hommage, à ce propos, au travail remarquable effectué par nos collègues de la section des sources iconographiques, de la photographie et de la filmothèque. Une photothèque-filmothèque riche de plus de 130 000 images numériques couleur et de près de 63 000 microfilms en noir et blanc qui a constamment bénéficié d’une collaboration étroite avec les bibliothèques municipales et universitaires de France, où sont conservés une grande partie de ces documents, et qui a pu se développer grâce au financement accordé par le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le ministère de la Culture ainsi que par le CNRS et la Région Centre grâce à un contrat de plan État-Région.

Je le disais en commençant, les découvertes qui vont être exposées aujourd’hui sont le fruit d’une remarquable collaboration scientifique. La publication qui en sera faite dans un numéro spécial de la revue Le Médiéviste et l’ordinateur ouvrira sans aucun doute la voie à de nouvelles recherches et applications, tant dans le domaine informatique que dans celui de l’histoire des textes.