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N° 43, 2004 : L’édition électronique > comptes rendus > éditions savantes

Les contes de Canterbury : une édition savante électronique

Auteur

Élisabeth Lalou
Elisabeth.lalou@univ-rouen.fr
Professeur d’histoire médiévale à l’université de Haute-Normandie

Citer cet artcile

Élisabeth Lalou, « Les contes de Canterbury : une édition savante électronique », Le Médiéviste et l’ordinateur, 43, 2004 [En ligne] http://lemo.irht.cnrs.fr/43/43-05.htm

Mots clés

édition, image, sgml, fac-similé, contes de Canterbury, Peter Robinson

Résumé : Les Contes de Canterbury bénéficient d’éditions savantes sur support cédérom. Le cédérom contient l’édition, les reproductions en couleur des manuscrits ainsi que des outils pour l’usage du chercheur.

Sommaire :

Introduction

Les éditeurs des Contes de Canterbury sont assurément les plus célèbres des éditeurs de texte sur support électronique. J’en veux la preuve dans la parution d’un article sur Peter Robinson en première page du journal Le Monde en 2000. « The Canterbury Tales Project » est ancien1 et ses participants sont les premiers à avoir annoncé leur volonté de travailler à l’édition électronique du texte fameux de Geoffroy Chaucer qui est conservé dans pas moins de 82 manuscrits et quatre éditions du xve siècle. Trois cédéroms sont sortis à ce jour : The Wife of Bath’s Prologue on CDROM en 1996, The General Prologue on CDROM en 2000 et enfin « The Hengwrt Chaucer Digital Fac-simile » édité par Estelle Stubbs de l’université de Sheffield sorti en 2000. Il s’agit là d’une véritable édition électronique savante utilisant tous les atouts de l’édition électronique.

« Here bygynneth the book of the tales of Canterbury. »

C’est sous ce titre que commence cette œuvre que les Anglais nomment « The Canterbury tales ». Chacun peut le voir écrit sur le premier feuillet du ms. Hengwrt.

Les deux manuscrits de base de cette édition électronique sont The Hengwrt Chaucer, manuscrit conservé à la bibliothèque nationale du pays de Galles (Aberystwyth, ms Peniarth 392 D) et le Ellesmere conservé en Californie (Huntington Library, San Marino, ms EL 26 C9).

Le manuscrit Hg conserve la copie la plus ancienne des Canterbury Tales. Il est daté d’avant la mort de Chaucer en 1400. À partir du xixe siècle, moment où les deux manuscrits sortirent des collections privées dans lesquelles ils avaient été conservés jusqu’alors, les éditions modernes des contes de Canterbury ont été établies à partir du Ellesmer. En 1979, un fac-similé en noir et blanc et une transcription du Hg fut publiée, qui entraîna des éditions nouvelles à partir de ce manuscrit resté jusque-là en retrait.

Le cédérom contient les images de tous les feuillets de Hg et la transcription des textes de Hg et de El.

Fac-similé

Ce qui « capture » au premier chef le lecteur sont les images du manuscrit. Ces images couleur de format JPEG en 225 dpi sont de très bonne définition2. On peut disposer d’une mire pour les couleurs et d’une échelle en centimètres. L’outil de circulation dans l’image est très pratique. Il est possible de disposer de l’image de 25 % jusqu’à 200 %. L’image s’affiche en pleine page au milieu de l’écran et sur la droite une vignette supporte un browser qui commande les mouvements de l’image plein écran. On peut distinguer en regardant ces images les plus petits détails affectant le parchemin ou la copie.

Édition savante

L’édition est une édition savante comme les chercheurs en ont la pratique. Une introduction étudie l’état de l’art des éditions de Chaucer. Une bibliographie est fournie. Sont inclus dans le cédérom deux articles savants sur la langue de Chaucer et la photographie numérique du manuscrit. Jusque-là, rien de révolutionnaire dans le fait que ce soit une édition électronique.

En revanche, la description du manuscrit est présentée de façon fort divertissante. Sont décrits successivement : le matériau (le parchemin), la mise en page, les cahiers, l’encre, les titres courants, la reliure, les gloses et notes marginales.

Des écrans spécifiques regroupent toutes les encres utilisées, tous les titres courants indiqués : ces écrans sont très clairs et permettent de prendre connaissance du manuscrit d’un seul coup d’œil. De même la présentation de la mise en page, des différents cahiers, agrémentés d’images de chacune des pages est très éclairante.

Le texte comprend donc une transcription des deux manuscrits Hg et El ainsi que de fragments dits « Mertyl ». La transcription est faite « à l’anglaise » sans résolution des abréviations. Sont transcrits aussi des fragments en Gallois, notes marginales se trouvant sur les fragments Mertyl. Pour ces fragments en Gallois, une traduction anglaise est fournie.

L’atout de l’électronique

Les avantages de l’électronique sont non seulement de pouvoir disposer des reproductions du manuscrit en couleur mais aussi d’avoir à sa disposition des hyperliens qui permettent une circulation dans l’ensemble de l’édition savante.

Dans l’édition de texte, des liens aboutissent à des concordances. La recherche est possible en sgml (l’ancêtre de l’actuel xml) : l’aide, très facile à utiliser, explique le mécanisme : on cherche sur les mots ou les structures du sgml. Un même procédé a été mis en place pour l’édition du chevalier à la charrette en ligne au CESCM de Poitiers3.

L’outil informatique développé par l’équipe de Peter Robinson à DMU University à Leicester a nom Anastasia. Il est fondé sur le Web.

Le cédérom des Canterbury Tales est donc un très bel outil pour les chercheurs et les curieux.

On peut seulement regretter le talent du conteur qui disait ces histoires à l’étape ou de ne pas disposer de l’image animée des contes4.

Notes

1 The Canterbury Tales project a été aidé par The British Academy puis par the Arts and Humanities Research Board. Les universités de Sheffield et De Montfort (Leicester) ont soutenu le projet jusqu’à l’achèvement de ce CDROM.

2 Les fichiers d’archive au format TIFF non compressé ont été conservées.

3http://www.mshs.univ-poitiers.fr/cescm/lancelot/

4 Comme dans le film de Pasolini.